Le banc de l'amitié, une bonne idée sur le papier mais des dérives non étudiées...
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Le banc de l’amitié est souvent présenté comme une idée formidable pour les écoles et le périscolaire : peu coûteuse, simple à mettre en place, facilement valorisable dans une communication institutionnelle. Il s’inscrit parfaitement dans un secteur où les budgets fondent année après année, en même temps que les moyens humains, la formation et les compétences éducatives. À ce titre, il constitue une réponse idéale : visible, symbolique, et surtout peu engageante.
Une solution qui évite le travail éducatif réel
Le banc de l’amitié a également l’avantage de contourner un travail bien plus complexe et exigeant : dialoguer avec les enfants, comprendre les situations, se positionner en médiateur et accompagner les dynamiques de groupe. Dans un périscolaire où les animateurs sont souvent recrutés dans l’urgence, peu formés, et insuffisamment accompagnés dans l’appropriation des valeurs éducatives et républicaines, les compétences relationnelles font parfois défaut. Dans ces conditions, le dispositif peut devenir contre-productif : sans harcèlement ni stigmatisation volontaire, certaines pratiques renforcent le sentiment de solitude d’un enfant, tout en donnant l’illusion qu’une réponse éducative a été apportée.
Quand le contexte institutionnel permet au dispositif de fonctionner
Ce type de dispositif peut néanmoins fonctionner dans des collectivités plutôt aisées, où les équipes pédagogiques et éducatives travaillent en cohérence et dans la continuité. Dans ces contextes, les enfants aux comportements brimants sont identifiés, pris en charge et accompagnés dans un véritable travail éducatif visant à modifier leurs comportements. Le banc de l’amitié y devient alors un outil parmi d’autres, intégré à une politique éducative globale, et non un substitut à l’action éducative.
Des dérives majeures dans les municipalités populaires
À l’inverse, dans de nombreuses municipalités populaires - souvent concernées par des écoles classées REP, où une partie des enfants n’est pas intégrée aux règles et aux valeurs communes - le dispositif se révèle fréquemment contre-productif. Faute de conditions éducatives adaptées, il peut produire l’effet inverse de celui recherché : stigmatiser un enfant, l’isoler davantage et le désigner implicitement comme « problème à gérer ».
La difficulté d’encadrer ce public est pourtant bien réelle, mais elle est aggravée par des taux d’encadrement identiques à ceux de territoires favorisés, un manque chronique de moyens, et surtout par des directions périscolaires défaillantes.
Des directions périscolaires déresponsabilisées et toxiques
Dans ces contextes, les directions périscolaires jouent souvent un rôle central dans l’échec du dispositif. Incapables de gérer un budget de manière stratégique, elles investissent dans des solutions symboliques plutôt que dans la formation des équipes. Les tâches éducatives complexes sont déléguées sans accompagnement, tandis qu’un management parfois toxique décourage toute prise d’initiative.
Par crainte d’endosser la responsabilité d’échecs pourtant prévisibles, ces directions choisissent fréquemment de ne pas intervenir, rompant toute cohérence éducative. Il n’existe alors aucun fil conducteur, aucune vision, et encore moins de continuité entre les intentions affichées et les pratiques de terrain.
Un outil révélateur plus qu’une solution
Dans ces conditions, le banc de l’amitié ne résout rien : il révèle au contraire les carences structurelles du périscolaire dans certains territoires. Il devient le symbole d’un renoncement éducatif, où l’on remplace l’accompagnement, la formation et la responsabilité par un objet, chargé de porter à lui seul des enjeux qu’il ne peut évidemment pas assumer.
Publié le 13 décembre 2025

